Exposition: à Deauville, Zao Wou-Ki, de la beauté en toutes choses

CRITIQUE – Les Franciscaines propose une superbe exposition du grand peintre chinois de Paris. Huiles, aquarelles, encres, tapisserie et porcelaines, son monde est fait d’impressions.

Zao Wou-Ki a ouvert en beauté la riche saison de «Normandie impressionniste 2024» qui célèbre les 150 ans de l’impressionnisme, du 22 mars au 22 septembre. Dès le 2 mars, ce peintre du souffle et de l’harmonie (1920-2013) a devancé aux Franciscaines de Deauville les célébrations qui vont les convoquer tous fin mai dans ce paysage de méandres, de prairies et de plages claires. De «Whistler, l’effet papillon» au Musée des beaux-arts de Rouen, à Laurent Grasso à l’abbaye de Jumièges. De Laurent Millet au Centre photographique de Rouen Normandie («Former l’Hypothèse») à Bob Wilson dans la cathédrale de Rouen («Star and stone: a kind of love… some say. Cathédrale de Lumière» avec Isabelle Huppert et Maya Angelou). Zao Wou-Ki, homme de silence et de sourire, les précède tous de son monde en paix, de son bonheur de peindre qui irradie et qui s’impose doucement, contagieux comme la joie.

Cet artiste né chinois en 1920 à Pékin, naturalisé français en 1964, mort en Suisse à 93 ans en 2013, a créé un pont des arts entre Orient et Occident. Son œuvre continue de surprendre par sa nature originale, maîtrisée et fraîche, après les grands formats de «Zao Wou-Ki. L’espace est silence» vus au Musée d’art moderne de Paris à l’hiver 2018, et le foisonnement de son œuvre dans «Zao Wou-Ki. Il ne fait jamais nuit» déployée à l’hôtel de Caumont d’Aix-en-Provence au printemps 2021. Zao Wou-Ki, comme tout artiste, dépasse à chaque fois le propos.

De ses grandes peintures impressionnistes à ses encres qui renvoient à la calligraphie chinoise, de ses livres d’art chevillés à la poésie aux stèles et vases de porcelaine qui mettent l’abstraction de sa touche en position impériale, il apporte beauté, paix et méditation à un public muet qui succombe à son charme. «Zao Wou-Ki, les allées d’un autre monde», c’est une balade au grand air piquant de la mer. «Les toiles de Zao Wou-Ki – cela se sait – ont une vertu: elles sont bénéfiques», dira le peintre et poète Henri Michaux. «Il est mon ami parce que sa peinture d’abord, sa présence plus tard, m’ont rendu heureux», a renchéri Claude Roy, Goncourt de la poésie en 1985. Ces citations rythment l’exposition de Deauville.

La quête de l’harmonie

Les Franciscaines, qui a déjà accueilli 500.000 visiteurs depuis son ouverture en mai 2021, a mis à profit son architecture blanche pour Zao Wou-Ki avec une scénographie libre, sans circuit de visite unilatéral. Et c’est sous le puits de lumière naturelle du foyer central qu’a été placé son trésor, l’Hommage à Claude Monet, vaste triptyque de 1991 (194 x 483 cm) qui renvoie aux Nymphéas du peintre impressionniste et qui invite le spectateur dans un jeu d’ombres bleutées et de nuages de pigments. «Tout paraît le fruit d’un seul geste et pourtant chaque centimètre carré est travaillé comme une miniature», souligne Annie Madet-Vache, directrice du musée. «Je peins ma propre vie mais je cherche aussi à peindre un espace invisible, celui du rêve, d’un lieu où l’on se sent toujours en harmonie, même dans des formes agitées de forces contraires», dit l’artiste en 1988 dans Autoportrait. Ce livre en forme de pierre angulaire a été écrit avec Françoise Marquet, conservatrice du Musée d’art moderne de Paris qui deviendra sa troisième épouse et, aujourd’hui, le bastion qui protège et valorise son œuvre depuis sa maison au bord du lac Léman. L’Hommage à Françoise, triptyque de 2003 au rouge doux et victorieux, est un grand coup de soleil, un crépuscule flamboyant ou un éternel champ de coquelicots.

Tout paraît le fruit d’un seul geste et pourtant chaque centimètre carré est travaillé comme une miniature

Annie Madet-Vache, directrice des Franciscaines

C’est en intime et en érudit que Gilles Chazal, directeur honoraire du Petit Palais et professeur à l’École du Louvre, a composé cette exposition aussi belle que pédagogique. L’œuvre du commissaire est de rendre à Zao Wou-Ki tout le souffle qui anime sa peinture, des grandes huiles aux encres et aux aquarelles qui traduisent l’harmonie avec la nature (Sans titre, Gaudigny, 2006), comme un éclat rose de printemps. Mais aussi son travail avec les manufactures de Sèvres et Bernardaud (somptueux Hommage à Li Po – La Lune et l’Ombre, 2008, émail sur porcelaine réalisé d’après l’original peint en 2005), avec la manufacture des Gobelins (Tapisserie Composition 1982, tapisserie de lice, 2008). «Peindre, peindre, la seule chose que je sache faire au monde, qui m’obsède et m’empêche encore de dormir, tant que ce que j’ai commencé n’est pas achevé», dit-il dans son Autoportrait. Commande de l’architecte Roger Taillibert en 1979, les neuf panneaux réalisés à l’aquarelle, disposés en accordéon, pour le collège de La Seyne-sur-Mer, restaurés, sont exposés ici (chaque panneau mesure 100 x 180 cm). Cette suite ininterrompue de bleus pâles et de bruns doux, date de 1981. Elle semble jaillir de la nuit des temps.

«Zao Wou-ki, Les allées d’un autre monde», jusqu’au 26 mai aux Franciscaines de Deauville (Calvados). Catalogue (25 €).

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