Festival du film américain de Deauville, au féminin : « Scrap » de Vivian Kerr avec Lana Parrilla et Anthony Rapp

La comédienne et réalisatrice Vivian Kerr accompagnée de Lana Parrilla ( « Why women kill » « Once upon a time » et qui vient de terminer un film aux côtés de Jennifer Lopez) d’Anthony Rapp ( « Rent », « Star Trek discovery ») a présenté son premier film « Scrap », dans le contexte d’un festival de Deauville très féminin, mettant en compétition de nombreux premiers films.


Vivian Kerr

LE FESTIVAL DU FILM AMERICAIN DE DEAUVILLE, 48ème du nom, a connu un excellent cru 2022, très suivi par un public nombreux, qui a pu apprécier des talents confirmés comme Jesse Eisenberg ( « Social Network ») et Thandiwe Newton, de nouveaux talents, Ana de Armas, Lucy Boynton, des réalisatrices à l’avenir évident comme Charlotte Wells qui a remporté le grand prix, Gina Gammell prix de la révélation, Jamie Dack prix du jury, sans parler de Sophia Silver, Chloe Okuno…

Le cinéma américain a une place à part dans le coeur et l’esprit du public français. Tout un chacun réagit à un film avec ses souvenirs, ses sentiments, son histoire personnelle, face à un cinéma qui peut être politique, social, écologiste, soucieux de liberté, de droits de l’homme, tout simplement humain avec des narrations qui nous touchent. Ce cinéma est un vrai plaisir qui peut aussi bien déranger, faire réfléchir, que réconforter, faire oublier qui on est pendant 1h30, 2h…

Arnaud Desplechin, président du jury a justement insisté sur  » l’Amérique qui n’a pas arrêté de se raconter à travers ses films, qui agit comme ses films, qui imite ses films… il y a une espèce d’ évidence de l’art américain ». Lucy Boynton, qui a été la première récompensée à Deauville par un « Hollywood Rising-Star Award », a affirmé haut et fort : » J’aime mon travail au-delà des mots. C’est un privilège absolu que de travailler dans un métier fait d’empathie et de narration ».

VIVIAN KERR JEUNE COMEDIENNE JEUNE REALISATRICE

Vivian Kerr coche toutes les cases de ce cinéma américain avec son premier long métrage « Scrap ». Elle est en effet scénariste narratrice, directrice d’acteurs, réalisatrice, productrice et elle joue le rôle principal de son premier film. En cela elle incarne le nouveau cinéma américain, les comédiens mettant la main à la pâte en plus de leur interprétation.

Je l’ai rencontrée dans les jardins du Royal Deauville, par une belle matinée estivale, avec ses comparses Lana Parrilla et Anthony Rapp et ils se sont livrés au jeu des questions-réponses à quelques heures de la présentation du film « Scrap » qui figurait dans la compétition du festival.

Vivian Kerr vient de Los Angeles. Après 4 ans d’ études de théâtre qui l’ont amenée à étudier Shakespeare, Molière, toutes les formes de théâtre et à apprendre à travailller sur et pour la scène, elle a joué dans de nombreuses séries que l’on a vues, pour certaines, en France, « Rizzoli and Isles », « Esprits criminels », « Grey’s anatomy »,  » Castle »… Ces expériences télévisuelles devant la caméra lui ont permis, comme elle l’exprime, d’accroitre ses compétences en matière de direction d’acteurs et de comprendre le ressenti du comédien.

2016 UNE REMISE EN QUESTION POUR VIVIAN KERR

En 2016 elle a connu une période difficile de remise en question, de burn-out . »Jouer c’était ma passion, mais jouer ne me rendait pas si heureuse que cela ». Elle veut donc « avoir une part plus importante dans le travail de l’équipe, réaliser, produire, s’investir davantage ». Elle se trouve donc à un carrefour. « Ou se renfermer, ou se développer ».

La période de la covid, avec son confinement, est pour Vivian Kerr une période de réflexion, pour mesurer ce qui est important dans sa vie. Son film « Scrap » est une histoire de famille et « pendant le confinement le rôle de la famille a été essentiel ». « On se disperse habituellement, on passe du temps à l’extérieur. Cette période de confinement nous a tous changé, pas seulement les acteurs. Maintenant on apprécie par exemple d’être ensemble aujourd’hui, à cette table, de pouvoir fréquenter des gens, de leur parler directement, sans zoom ».

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Vivian Kerr a donc beaucoup écrit, comme tout le monde du cinéma, avec le temps pour le faire.

« SCRAP » ET SA GENESE

« Scrap »a d’abord été un court métrage réalisé par Leena Pendharkar, écrit et interprété par Vivian Kerr. « Quand le film est sorti, j’ai mesuré que l’histoire était importante pour moi. J’ai alors voulu explorer les personnages. Le public voulait en savoir plus sur le frère, sur sa femme, ce qui allait se passer après le mot fin ». Il lui a donc fallu aller plus loin, avec un sujet qui lui tenait à coeur et la volonté de traiter les personnages en profondeur , »comme ils le méritent ».

Dans « Scrap », dont l’histoire se passe à Los Angeles ville dans laquelle il y a de plus en plus de SDF dans leurs tentes installées sur les trottoirs, Beth perd son travail. « Elle a toutes les peines du monde à sauver les apparences, celles d’une femme active de la classe moyenne de Los Angeles. Espèrant obtenir un nouvel emploi et changer ainsi sa situation avant que son frère Ben ne s’en aperçoive, Beth doit ravaler sa fierté et renouer avec lui afin de subvenir aux besoins de sa fille Birdy. » Elle habite dans sa voiture. Son frère est marié. Avec sa femme ils ont un problème de fertilité et ils vont connaitre la fécondation in vitro. Les secrets des 3 personnages ont visiblement passionné la réalisatrice.

Le mot « Scrap » a plusieurs sens. « Scrap » c’est un petit quelque chose qui reste, un peu de fierté, une dernière chose à laquelle on peut se raccrocher. Dans le film on a quelqu’un qui vit dans sa voiture, quelqu’un qui a tout perdu. Ce dernier petit quelque chose qu’elle a en elle, si elle le perd, elle perd tout. C’est la dernière chose qui te raccroche à la dignité ».

VIVIAN KERR LA FAMILLE, LES RAPPORTS FRERE ET SOEUR

Vivian Kerr insiste sur le rôle de la famille : « Ne pas avoir de famille cela peut ne pas être un problème, mais vraiment il faut avoir beaucoup de reconnaissance pour sa famille, donner de l’amour, du pardon car on ne connait pas toujours quelles sont les épreuves traversées. Il faut essayer d’améliorer les relations entre les membres de sa famille ».

Les rapports frère-soeur sont un autre thème de prédilection de la réalisatrice. Elle avoue ne pas avoir de frère mais une soeur plus âgée : « On est très proche, c’est ma meilleure amie. Nous sommes très différentes mais notre relation est très forte. Elle comprend d’où je viens, c’est la seule. C’est important de savoir d’où l’on vient, comment on a grandi. J’ai de la peine pour les gens qui n’ont pas cette chance. Même si on ne se parle tous les jours.


Anthony Rapp

Anthony Rapp comédien de théâtre, de cinéma, chanteur, juge le rôle ambivalent du frère de Beth qu’il joue tout en finesse. Ben est un écrivain à succès. Protecteur avant tout il accepte que sa soeur emménage chez lui quand il apprend qu’elle n’a pas d’endroit pour vivre. Désapprobation voilée de sa femme Stacy. Les vieux conflits entre frère et soeur vont resurgir dans une cohabitation qui perdure.

MATERNITE ET FEMINITE

La maternité et la féminité sont aussi un thème privilégié par Vivian Kerr. « Il y a beaucoup de personnages féminins qui ne sont pas passionnants et les femmes réalisatrices essaient de développer des personnages denses. En France des voix féminines s’expriment comme Céline Sciamma avec son film « Petite maman ». C’est très excitant ». D’où dans « Scrap », l’importance de la réflexion sur la maternité.


Lana Parrilla

 Lana Parrilla qui interprète le rôle de Stacy, belle-soeur de l’héroïne, a beaucoup observé les femmes qui essaient d’avoir un enfant. « Il faut travailler et construire un personnage qui a une histoire complète, avec son passé, sa psychologie, ses relations familiales, dans la vie ». En parlant à ces femmes, à des médecins, elle a essayé de comprendre leur douleur, leur combat. Désirant avoir des enfants un jour elle comprend ce désir. « Tous les personnages que je joue ont un côté qui m’appartient », ajoute-t-elle. Et elle porte un regard très juste sur Beth qui a une fille, Birdy, mais qui ne réussit pas avec elle pour des tas de raisons. « Il y a des gens qui sont bien pour faire les choses, ils sont doués, enfants ,carrière réussis. Et d’autre pas. Stacy est une brillante avocate ; elle voit Beth qui a un enfant et elle, elle ne réussit pas à en avoir, d’où désir, envie, frustration. Même si elle peut naviguer à travers ses problèmes mieux que Beth.La vie c’est comme çà. »

SOCIETE AMERICAINE,TRAVAIL ET ECHEC

La réalisatrice a une vision bien à elle de la société américaine : « L’ Amérique est connue pour sa croyance dans le travail, dans la réussite par le travail, la culture du travail. Il ne faut jamais s’arrêter de travailler. Tout est basé sur le succès grâce au travail. Il est dur de chuter. C’est comme une promesse qu’on a faite et qui nous a échappé. On est loin du rêve américain. On s’éloigne. Ce mirage est puissant en nous. Les américains sont optimistes de nature, pas cyniques pour la plupart. Quand on traverse les épreuves, on va être comme un enfant, un peu perdu et émotionnellement c’est dur de se relever, mais bon, c’est comme ça ».

CINEMA ET FINANCES

Réussite ou échec tout dépend au départ,dans le cinéma, d’une histoire à raconter mais aussi du financement nécessaire pour avoir les moyens de raconter cette histoire et de la mener à son terme. Souvent les projets cinématographiques achoppent sur des problèmes de financement que connait bien Vivian Kerr :  » C’est très dur pour tout le monde, pour les premiers films. On se demande si on va aller jusqu’au bout. Les producteurs peuvent nous fermer la porte au nez. C’est la limite de ce qu’on peut supporter comme échec et on peut abandonner. Ma productrice, Rachel Stander, a été une vraie chance pour moi car elle croyait beaucoup au film, à l’histoire, au sujet. Elle m’encourageait, m’apportait la force de continuer. Le plus dur de la production c’est trouver l’argent. Pour ce film on avait peu d’argent et il fallait savoir où on mettait l’argent. On a recruté un directeur de la photo, Markus Mentzer, qui avait beaucoup d’expérience, de chef opérateur ayant participé au festival de Sundance. Confiance totale ».

Après avoir réalisé son film et l’avoir présenté au public, Vivian Kerr réalisatrice a d’autres ambitions cinématographiques et des projets en tête : « J’aimerais participer à l’éducation des filles dans les pays où les femmes n’ont pas cet accès. Je pense que si nous pouvions trouver un moyen pour que ces jeunes femmes puissent raconter leurs propres histoires, cela ferait une énorme différence ». 

Le cinéma est en effet la solution pour aider à l’expression de ceux et celles qui ont des choses à dire, à transmettre ce qui n’est sans doute pas le cas des réseaux sociaux.

RESEAUX SOCIAUX AMBIVALENTS

L’analyse de Vivian Kerr sur les réseaux sociaux est sans ambages : « J’utilise les médias sociaux mais si on est honnête !!! Professionnellement c’est positif mais ce n’est pas sain quand nous devons être les stars de nos propres émissions de téléréalité et devenir des influenceurs sur instagram. Actuellement beaucoup pensent : « quelle est la valeur d’un livre si personne ne sait que vous l’avez lu ; la valeur d’une réussite non postée sur facebook ! »

Au total « Scrap » est un film réussi, avec comme le dit Anthony Rapp (qui avait déjà joué dans le court-métrage), beaucoup de talent de la réalisatrice, une belle entente entre les comédiens, de belles relations des personnages, un scénario riche et délicat. »



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