Invité du festival Planches contact, le grand photographe Raymond Depardon était à Deauville (Calvados) ce week-end. Devant son exposition installée sur la plage, ce photographe « de l’intérieur des terres » qui a l’habitude de privilégier le noir et blanc raconte comment il a posé ses yeux sur le littoral, en couleur. Rencontre.
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« Je découvre comme vous ces grands tirages magnifiques sur le littoral, je suis très content de cette exposition, les photos reviennent au point de départ ». Son appareil Leica bien en main, discret, Raymond Depardon lève les yeux et observe avec attention ses grandes photographies installées sur la plage de Deauville pour le festival Planches contact.
Photographe et réalisateur de films documentaires et figure incontournable de la photographie française, il a été « le témoin discret et engagé, qui a regardé le monde presque toujours en noir et blanc, sans arrêter de chercher le meilleur angle pour raconter la vie des autres et celle du monde », rappelle Laura Serani, directrice artistique du festival. À Deauville, c’est une toute autre facette de ce grand œil que l’on découvre.
Un littoral qui l’apaise
Au festival Planches contact, sont exposées ses photos du littoral français hors saison, prises à la chambre, en couleur et reproduites en très grand format. » Ces images, moins connues que d’autres, font partie de son important travail sur la France, pour lequel il a sillonné l’hexagone et porté son regard sur le territoire, sur ce qui reste et ce qui va disparaître », commente Laura Serani. Ces photographies, il les a faites « après un long périple sur la ruralité », alors que ce photographe qui voyageait partout dans le monde était animé par l’envie de retravailler sur la France. « Je suis plutôt quelqu’un de l’intérieur des terres moi, je ne suis pas quelqu’un du littoral, mais je l’ai découvert et ça m’a fait du bien, ça me reposait, surtout ici. Le littoral français est extraordinaire : c’est le littoral le plus beau et le plus grand d’Europe », sourit le photographe de 80 ans, avant d’évoquer, levant les yeux vers le ciel, la lumière si particulière du bord de mer, notamment en Normandie. « J’avais du plaisir à venir faire des photos du littoral parce que dès que j’avais du mauvais temps, en allant sur le littoral j’avais une chance d’avoir une grande variété de lumières », contemple-t-il, les pieds dans le sable.
Du noir et blanc à la couleur
En se lançant dans ce travail sur le littoral, comme souvent, il avait l’envie au départ de faire du noir et blanc. « Heureusement Claudine (Claudine Nougaret, son épouse ndlr) m’a dit non », lance-t-il, le sourire malicieux. Quand on est habitué aux contrastes en noir et blanc du travail de Raymond Pardon, ces couleurs surprennent et emportent le regard. Sa photographie qui assume pourtant sa part de subjectivité, se fait toujours aussi frontale et authentique, dépeignant avec force le quotidien.
Pour se lancer dans la couleur, dans ce travail photographique qu’il a réalisé « en solitaire », Raymond Depardon a dû apprivoiser le thermocolorimètre, un appareil de mesure qui permet de déterminer la température de couleur de la lumière, notamment pour les prises de vues photographiques. « Je ne savais pas trop m’en servir, j’ai commencé à regarder et à comprendre comment fonctionnait la couleur », raconte-t-il.
Évoquant en bon technicien, la « magie » des films Kodad faits pour la lumière et les couleurs du littoral, il raconte :
Je me suis aperçu que je n’étais pas le même. Comme photographe noir et blanc, j’aimais plutôt les tirages assez sombres, les ciels bien montés, une certaine dramaturgie. En couleur, j’étais plutôt dans le sucre d’orge, les bonbons, l’école, la ferme du Garet (la ferme de son enfance ndlr), le vélo. En bref, quelque chose de joyeux, et pas du tout de triste. Ces ciels très lumineux ont commencé à m’apparaître sur la photo couleur d’une manière totalement différente et j’ai commencé à y prendre goût.
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