En ce mois de juin 2024, la Normandie a vécu un anniversaire du Débarquement particulièrement intense : 80 bougies ont été soufflées, avec autant d’évènements organisés dans la Manche et le Calvados, tous chargés en émotions. Retour sur une semaine haute en couleurs, pour ce qui était sûrement le dernier grand anniversaire en présence des vétérans.
La Normandie a vibré toute la semaine au rythme des cornemuses et du bruit des avions : le 80e anniversaire du Débarquement était célébré partout, dans la Manche et le Calvados, du lundi 3 au dimanche 9 juin 2024.
Au cœur de tous les discours et de toutes les cérémonies, les vétérans présents ont été portés en héros. Ils ont partagé de rares moments de communion avec le public, qui avait davantage conscience cette année de la fragilité de ces derniers témoins de l’Histoire. Ouest-France vous propose des morceaux choisis de cette semaine exceptionnelle, jour par jour.
Les vétérans, passeurs de mémoire et héros des enfants
LUNDI 3 JUIN. « Merci ». Sur le tarmac de l’aéroport de Deauville-Normandie (Calvados), 48 vétérans américains, tous âgés entre 97 et 103 ans, ont été accueillis par un sacré comité d’accueil composé d’écoliers, d’élus, des personnels de l’aéroport, d’anciens combattants et même… de Brigitte Macron, dont la venue était une surprise ! Ils ont été acclamés par des centaines d’écoliers à leur descente de l’avion. « Merci », « Hello Mister ! », criaient les enfants sur le tarmac.
Deux enfants, Mathy et Tyméo, ont offert un dessin à un vétéran du Pacifique, André Chappaz, lundi 3 juin à Deauville. Ouest-France
Mathy, 9 ans, Tyméo, 6 ans, avec leur maman Laëtitia, originaires de Saint-Gorgon (Morbihan) et leurs grands-parents Isabelle et Jean-Luc, ont pu assister à la cérémonie à l’aéroport de Deauville-Normandie. « On vient chaque année. On a rencontré Andy Negra, un vétéran, avec qui on a noué un lien fort. On lui avait répondu à un post sur Facebook et on nous a invités à cette cérémonie », a raconté Laëtitia.
Des vétérans britanniques de la Seconde Guerre mondiale sont à bord du « Mont Saint-Michel » le bateau de la Brittany Ferries sur lequel ils ont embarqué à Portsmouth (Angleterre). DAVID ADEMAS / OUEST-FRANCE
Même chose pour Maya et Elia, de Rots (Calvados), accompagnées de leur grand-mère Marianne, et qui ont été invitées par le vétéran star des réseaux sociaux : Papa Jake. « On a fait la rencontre de vétérans il y a deux ans, à l’hôtel Mercure. On a rencontré Papa Jake et on s’est attaché à lui. Nous sommes allées en Californie, à côté de San Francisco, pour fêter ses 101 ans, en décembre 2023. »
80 ans après, ils retraversent la Manche
MARDI 4 JUIN. Quatre-vingts ans après, des vétérans anglais ont refait le chemin du 6 juin 1944. Ces 29 vétérans britanniques ont rallié Portsmouth (Angleterre) au port de Ouistreham (Calvados), via une traversée de la Manche en ferry, à bord du Mont-Saint-Michel. Ceux qui ont connu l’horreur des années plus tôt en arrivant sur ces plages normandes étaient très émus, mardi, en débarquant.
Henry Rice, vétéran britannique de la Royal Navy, ravi d’être en Normandie, s’est prêté à une danse avec une passante sur un air de cornemuse à Sainte-Mère-Église (Manche). Ouest-France
« Je suis vivant et je suis heureux, voilà comment je me sens aujourd’hui ! », a lâché Henri Rice, vétéran anglais bien connu dans la région. Ce jeune soldat de la Royal Navy avait débarqué à Juno Beach sans savoir ce qui l’attendait en 1944. Il a gardé de ses visites en France jusqu’à certaines coutumes : il réclame toujours deux bises quand on l’aborde.
Ici dans la cour d’honneur du Conseil départemental de la Manche, Alan M. Shapiro, qui était pilote de C-47 en 1944. David Daguier – CD50
Au Conseil départemental de la Manche, à Saint-Lô, sept vétérans américains ont aussi été mis à l’honneur. Parmi ceux-ci, Alan M. Shapiro, qui était pilote de C-47 au moment du Débarquement, et qui n’a pas manqué de raconter son anecdote. « Il y a quatre-vingts ans, je survolais la Normandie pour larguer des parachutistes. Vous me paraissiez tout petits. Je vois que vous n’êtes pas aussi petits que cela. Merci pour votre hospitalité, elle me rappelle l’hospitalité que nous avons connue en 1944. »
Le président de la République Emmanuel Macron à la prison de Caen en mémoire des 87 prisonniers exécutés par la Gestapo le 6 juin 1944. Il était accompagné de Bernard Duval, un rescapé. Stéphane Geufroi / Ouest-France
Les officiels arrivent, la Normandie bouclée
MERCREDI 5 JUIN. Cette journée aura marqué le tournant « officiel » de la semaine. En cette veille du D-Day, le président Emmanuel Macron a entamé son parcours mémoriel de trois jours. Après avoir rendu hommage aux parachutistes à Plumelec (Morbihan) en fin de matinée, il a présidé une cérémonie dédiée aux victimes civiles de la guerre, au haras de Saint-Lô (Manche).
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Puis le président de la République a rejoint l’ancienne prison de Caen (Calvados) pour rendre hommage aux 80 résistants fusillés par la Gestapo dans cette enceinte le 6 juin 1944. Les deux agents pénitentiaires blessés au péage d’Incarville (Eure) étaient présents à la cérémonie.
Environ 1 000 personnes, en majorité britanniques, ont pris place au cœur du cimetière militaire de Bayeux, mercredi, pour la cérémonie du souvenir organisée par la Royal British Legion. Dont la princesse Anne, de la famille royale britannique. Marc Ollivier/Ouest-France
D’autres personnalités comme le prince Albert de Monaco et la princesse Anne d’Angleterre étaient aussi en Normandie, ce mercredi. La princesse a d’ailleurs assisté à l’émouvante cérémonie au cimetière britannique de Bayeux (Calvados), en présence de vétérans. Le roi Charles III, lui, est arrivé dans la soirée.
Mercredi à 23 h 15, des milliers de personnes ont assisté à la Midnight Ceremony sur le pont de Pegasus à Bénouville, pour célébrer la prise du pont par les commandos britanniques de la 6e Airborne division, sous les ordres du Major Howard, le 5 juin 1944. Stéphane Geufroi / Ouest-France
Autre rendez-vous incontournable : la Midnight Ceremony à Bénouville (Calvados), sur le fameux pont Pegasus Bridge, a rendu hommage, un peu avant minuit, aux soldats qui ont livré les premiers assauts de la Bataille de Normandie.
Là encore, des milliers de personnes étaient présentes, ainsi que les deux ministres Éric Dupond-Moretti et Sébastien Lecornu. « Je n’ai jamais vu autant de Français à la Midnight Ceremony » a noté, rieur, Neal Clark, sergent du bataillon de réserve 7th Rifles de l’armée anglaise.
Reconstitution du Débarquement à Utah Beach, le 6 juin 2024. Thomas Brégardis/Ouest-France
Les yeux du monde rivés sur la Normandie
JEUDI 6 JUIN. Le Jour-J est là. Et, comme il y a quatre-vingts ans, il a commencé tôt : aux premières lueurs du jour, la foule était au rendez-vous sur différentes plages du Débarquement : que ce soit à Arromanches (Calvados), ou à Saint-Martin-de-Varreville à Utah Beach (Manche). Des centaines de reconstitueurs et de militaires, sur place, ont joué le jeu et donné à voir un véritable spectacle.
Véhicules amphibies, avions, parachutages, véhicules d’époque… sous un soleil naissant, le show était impressionnant. Et le public était ravi. « C’est un si grand honneur d’avoir pu prendre part à cela », a confié Ben Eddlimon, senior chief petty officer dans l’US Navy, avec son parachute sur l’épaule.
Le président américain Joe Biden (au centre) serre la main du président ukrainien Volodymyr Zelensky (à gauche) sous le regard du président français Emmanuel Macron (à droite). LUDOVIC MARIN/AFP
Il régnait un air de fête en ce début juin. Ici, un couple danse à Arromanches (Calvados), vendredi 7 juin, devant des véhicules d’époque. Marc Ollivier/Ouest-France
Mais à peine plus tard, alors que ce jeudi sonnait la tenue des cérémonies internationales en présence de 25 chefs d’États, le public a un peu déchanté : ceux qui voulaient assister aux cérémonies ont dû attendre des heures pour y assister, et d’autres n’étaient tout simplement pas ouvertes au public.
Avec, présence d’officiels oblige, des conditions de circulation très difficiles dans les villes/lieux de mémoire. Au désarroi des locaux, qui se sont parfois sentis « dépossédés » de leur histoire. « Moi j’aurais bien aimé amener les enfants à la commémoration, à Omaha, c’est notre histoire, quand même ! » s’est agacée une Bayeusaine.
Organisation titanesque, sécurité plus que renforcée, conditions de circulation parfois lunaires dans des endroits non-adaptés à un tel déferlement : ce 6 juin a aussi fait ressortir la difficulté d’accueillir autant de visiteurs et de personnalités publiques sur les côtes normandes.
Le vétéran de la Seconde Guerre mondiale Harold Terens, 100 ans (à gauche) et Jeanne Swerlin, 96 ans (à droite), arrivent à la mairie de Carentan-les-Marais, en Normandie, le 8 juin 2024. LOIC VENANCE / AFP
Ce qui n’a pas empêché le monde entier d’avoir les yeux rivés sur la Normandie : d’abord avec la cérémonie franco-britannique au Mémorial de Ver-sur-Mer (Calvados), puis la cérémonie franco-américaine au cimetière américain de Colleville-sur-Mer. Avant, enfin, la cérémonie internationale sur le sable d’Omaha Beach, clou du spectacle, qui a réuni des dizaines de chefs d’États, dont le président ukrainien Volodymyr Zelensky. Et d’invités surprise, avec la présence remarquée du duo du film culte Il faut sauver le soldat Ryan, l’acteur Tom Hanks et le réalisateur Steven Spielberg…
Ont aussi eu lieu des moments suspendus et forts en émotions. Quelques jours plus tard, on garde encore en tête l’air du Chant des partisans, entonné par les élèves de la Maîtrise populaire de l’Opéra-Comique, sur le sable de « Bloody Omaha », celle qui aura été la plage la plus meurtrière du D-Day.
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300 parachutistes dans le ciel du Mont Saint-Michel
VENDREDI 7 JUIN. Emmanuel Macron a conclu son parcours en Normandie avec un discours à Bayeux (Calvados) et un passage par Cherbourg (Manche), au bras de Paul Letterier, le dernier survivant des fusiliers marins de la France Libre ayant participé à la bataille de Bir Hakeim et de Jean Pivain. Pendant que Joe Biden lui, se rendait à Colleville-sur-Mer et à la Pointe du Hoc.
Mais ce vendredi 7 juin a surtout marqué le début de ce week-end de D-Day et les festivités ont augmenté d’un cran. À Sainte-Mère-Eglise (Manche), on ne savait plus où donner de la tête lors des démonstrations du Camp Geronimo, avec une vraie variété de véhicules, exposés toute la semaine. À Arromanches, la plage avait des airs des années 40, remplie de gens costumés et de véhicules anciens.
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Une chorégraphie aérienne parfaitement coordonnée dans le ciel d’Arromanches (Calvados). Stéphane Geufroi / Ouest-France
Et s’il n’y avait qu’une image à retenir du vendredi, ce serait celle-là : 300 parachutistes qui se sont jetés dans le ciel du Mont Saint-Michel (Manche) pour rendre hommage aux soldats morts pendant le Débarquement.
« C’est dur de trouver les mots pour décrire l’honneur que l’on ressent en sautant ici, pour les commémorations. Quand je me suis retourné et que j’ai vu l’abbaye, je me suis cru dans un conte de fées », décrit Dylan Parcetti, venu de Floride. Et il est vrai que ce vendredi, sous un soleil normand qui n’en finissait plus de briller, le Mont avait des airs merveilleux.
Les spectateurs étaient postés sur les falaises ou sur la digue, pour avoir une vue bien dégagée. Stéphane Geufroi / Ouest-France
Le début du week-end a aussi marqué la tenue de nombreux bals et concerts, partout dans les villes du Calvados et de la Manche les vendredi et samedi. Chorales, orchestre, bals dansants… La musique a résonné dans les rues au rythme du D-Day. À Sainte-Mère-Eglise (Manche), on s’est laissés porter par les notes de la chanson Le sud, de Nino Ferrer, interprétée par 250 choristes.
À 100 ans, le vétéran a épousé sa compagne
SAMEDI 8 JUIN. Place aux belles histoires. Samedi, la ville de Carentan-les-Marais (Manche) a accueilli une cérémonie de mariage peu commune. Le vétéran américain Harold Terens, ancien opérateur radio de l’US Air Force qui vient de fêter ses 100 ans, a épousé sa compagne Jeanne, 96 ans. « J’aime tellement ma femme. J’avais peur de la perdre. Si je ne l’épouse pas, elle serait capable de me quitter », avait confié en riant Harold Terens à Ouest-France.
Les reconstitueurs historiques ont fait revivre la mémoire de l’exode des civils, devant des milliers de spectateurs. Thomas Bregardis / Ouest-France
Et ce n’est pas leur âge qui les empêche de passer des messages d’amour et de paix. « On le dit aux jeunes : il n’est jamais trop tard pour aimer, et croyez-nous, on est encore dans l’action. » Les « jeunes mariés » ont été largement acclamés par leur proche et le public venu voir cette union. Le soir, le couple était invité à dîner à l’Élysée, en compagnie des couples Macron et Biden.
Du côté calvadosien, ce n’est pas à la mairie mais dans le ciel que le spectacle s’est tenu : la Patrouille de France a ravi les quelque 50 000 personnes présentes à Arromanches pour admirer le meeting aérien. Un véritable ballet tricolore.
350 véhicules datant de la Seconde Guerre mondiale ont défilé dans le cadre du 80e anniversaire du Débarquement, à Bayeux. Martin ROCHE/ Ouest-France
Dernier point fort de la journée, et pas des moindres : la Marche de l’exode à Carentan (Manche) a réuni plus de 300 reconstitueurs, dont des enfants, pour mettre en scène l’exode civile qui a suivi les bombardements du D-Day. Et en regardant cette petite fille, peluche sous le bras, quelques affaires dans son sac, l’effet était immédiat.
Partout en Normandie, foule immense pour le clap de fin
DIMANCHE 9 JUIN. Le dernier jour de cette semaine particulière de commémorations est arrivé. Et le public était très (très) présent pour les derniers événements : notamment à La Fière, dans la Manche, où des parachutages au-dessus des marais ont été particulièrement populaires.
« J’ai trouvé ça magnifique ! s’est exclamé Paul, 12 ans, ravi d’être là. Ce n’est pas tous les jours qu’on voit comme ça des parachutistes et de gros avions. C’est impressionnant aussi de voir le nombre de personnes qui sont venues aujourd’hui. »
À Bayeux, même chose pour la Liberty parade dans les rues de la ville, où plusieurs milliers de personnes étaient rassemblées. Tout comme à Sainte-Mère-Eglise (Manche), petit village de 2 500 habitants qui n’a pas désempli de la semaine et aurait accueilli, selon estimations, près d’un million de visiteurs en 10 jours. En fin d’après-midi, c’était aussi l’heure de remballer pour les différents camps de reconstitueurs, parfois avec un léger pincement au cœur.
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Et partout dans la foule, on a vu des costumes, des drapeaux, des gens qui dansent sur des airs de jazz, en bref : de la ferveur. Preuve s’il en fallait que même 80 ans après, la mémoire du D-Day ne s’est pas effacée sur les terres normandes, toutes générations confondues.
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